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14/12/2004

Europe et Islam

Kamel : « Les Israëliens, ce sont mes cousins ! »

Changement de décor pour ce dernier café-philo de l’année 2004. Le café « La Cloche » à Lille a pris des allures d’une vaste tente où les uns et les autres ont pris place. Le débat annoncé est des plus périlleux. 10 à 12 millions de nos concitoyens se disent musulmans en Europe. Les mises en garde se multiplient…

Anne-Sophie a lu « Ce que pense Allah de l’Europe » de Chahdortt Djavann. L’Europe serait devenue ce « laboratoire » en raison « des lacunes que le droit engendre ». Et d’évoquer ce « mythe à la patrie islamique » qui s’infiltre dans les banlieues. Nicolas est venu après avoir lu « Marianne et le Prophète », ouvrage de Soheib Bencheikh, recteur de la Mosquée de Marseille, qui décortique les relations entre la République et l’Islam. On replonge dans l’histoire avec cette première loi de séparation (1795) qui édictait ni plus ni moins que « le cœur de l’homme est un asile sacré où l’Etat ne doit pas descendre ». Il pointe toutes les formes d’archaïsme, avec au premier rang, celui venant d’Arabie Saoudite, où « la politique manipule le religieux ». Il s’interroge sur l’Islam en France en soulignant « l’absence de lieux de culte » qui serait lié à « sa relative jeunesse » et au fait que cette religion « ne dispose pas de clergé ». Mais pas de doute, la laïcité à la française, « c’est un processus auquel l’Islam va se plier ». Et de donner une clé : « L’application de la laïcité, il la voit dans la bienveillance entre les religions ». Pas besoin donc de toucher à la loi de 1905 mais il faut l’appliquer « de manière plus juste et plus équitable entre les religions ».

Une bonne entrée en matière. Un homme se lève, une voix s’élève. Celle d’un homme, musulman. Son langage est clair : « Les autres religions ont la chance d’évoluer beaucoup. Moi je ne suis pas le recteur de la Mosquée de Lille quand il dit que dans un pays où 51% de la population est musulmane, la charia s’applique ». Non, notre homme se pose des questions. « Qui décide qui est musulman ? C’est une vraie nébuleuse… ». Et de poursuivre : « Cela fait cinq siècles que tous les musulmans ont perdu leurs repères ». Il fut une époque où les religions cohabitaient ensemble. « Moïse est notre Saint, Marie notre Sainte » confesse celui qui voit dans l’Islam des origines une « religion tolérante ». Si le prophète a dit « voilez vos femmes et vos filles, c’est pour des distinctions ». Rien à voir donc avec ce que l’on entend aujourd’hui. Et notre homme toujours de pointer du doigt « les chrétiens qui ne connaissent rien sur l’Islam et l’Islam qui ne connaît les chrétiens ». Il manque des « bons musulmans qui savent discuter avec les chrétiens ». Un ange passe.

Le débat est ouvert. René qui préside une association sur Armentières vient justement expliquer cet « Islam divers avec ses croyances diverses ». Edith de Marcq en Baroeul se félicite de la dernière proposition du Ministre de l’Intérieur de mettre en place « une école des Imans ». Vincent de Lambersart pointe ce « manque d’exégèse ». Patrice de Fâches-Thumesnil pense « que la chance de l’Islam, c’est de devenir un jour laïque ». Louisa, de Roubaix, s’insurge contre ces livres qui circulent, « qui disent n’importe quoi et qui ne sont pas interdits ». Et Louisa de mettre le doigt sur une vraie question : « Nous ne devons pas faire le transfert de toutes nos incapacités à l’Europe ». Et de prendre un exemple : « En Algérie on n’arrête pas les chaînes de production pour la prière et ici en Europe, il faut des négociations syndicales pour les arrêter ! ».

Jacques, discret tout au long des échanges vient rebondir sur les derniers propos de Louisa : « C’est vrai que ces débats qui se déroulent sur le territoire (le nôtre) concernent (aussi et avant tout) d’autres pays ». Et d’insister : « On ne peut pas prendre un pays en otage ! ». Et de mettre en avant tous ces efforts faits pour développer le dialogue entre les religions et la construction naissante d’une véritable exégèse musulmane. L’Islam ne fait que nous renvoyer à certaines questions, celle de la spiritualité d’abord dans un contexte où des mosquées poussent et des églises disparaissent… termine un participant. Si les risques sont grands, les enjeux sont gigantesques ! Ainsi se termine toujours un café-philo, en donnant une autre dimension aux questions posées. CQFD.

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